[DIVERS] metalogique et raisonnement

[Norman Molhant <nwm@vif.com>]

Bonsoir!

L'ami Manuel, que je remercie vivement pour ce message qui dit
mieux que je ne l'aurais fait bien des choses que je voulais
dire depuis un bon moment sans trouver les mots juste, a écrit:

 > Je vois de plus en plus des messages où on met en opposition
 > la vision humaniste du monde contre la vision scientifique.
 > Je vois ça avec amertume.  J’ai fait mes études de philosophie
 > simultanément a ces d’astrophysique et je ne vois pas
 > d’opposition mais de la complémentarité.

J'ai étudié la physico-chimie (structure de la matière) et aussi
l'astrophysique (dynamique stellaire); mes profs de philosophie
m'ont dégoûté de ce domaine (ils enseignaient la philo de la même
façon que l'on enseigne hélàs l'histoire: des noms, des dates et
des idées à apprendre mais à ne pas discuter) de sorte que je suis
totalement incompétent dans ce domaine.  Par chance, j'ai appris
à raisonner et - surtout - à appliquer le raisonnement logique à
tous les problèmes et toutes les situations.  Cela compense un peu
pour mon ignorance de la philosophie et mon dégoût de la plupart
des textes des grands philosophes (ils m'endorment)...

Néanmoins, tout comme Manuel, je ne vois pas opposition mais bien
complémentarité entre la vision scientifique et la vision humaniste,
ou entre la vision scientifique et la vision artistique, ou entre
la raison et l'émotion.

 > Bien sur il y aura assez des scientifiques vaniteuses et pompeuses
 > (probablement pas idiots) mais en général les plus pointus des
 > scientifiques sont des gens polis pleins d’intérêt pour le devenir
 > de nos sociétés, et avec une curiosité omni-embrassant pour les
 > domaines les plus diverses des sciences dites humains.

C'est aussi ce que j'ai constaté.

 > ... mais soyons respectueuses et humbles devant les apports de ces
 > grands hommes, Darwin, Aristote et autres qu’on aidé si tant notre
 > planète a croitre.

Mille fois oui!
De la même façon dont ces gens-là ont pu dépasser les idées de leurs
prédécesseurs ainsi devons nous à notre tour dépasser leurs idées,
mais comme le dit Manuel, respectons-les car ce sont leurs apports
qui nous ont amené jusqu'en ce point où nous devons les dépasser...

 > ... et on dédie nuit et jour a percer le koan pour aller au delà.
 > Puis un jour on trouve quelque chose. Le monde semble limpide et on
 > continue à faire zazen a pratiquer a résoudre plus et plus de koan.
 > Un jour un ami a moi –ca fait quelques peu d’années- m’a dit
 > « je pense que pratiquer c’est bien, mais a la fin ca me semble se
 > regarder trop le nombril ». J’ai continué à m’asseoir (on dit ca
 > dans l’argot pour faire référence a la méditation, au zazen) et je
 > continue à le faire, m’ai j’ai laissé tomber.

Pour te faire sourire, ami Manolo, voici deux petits textes de ma main,
datant déjà de plus d'une douzaine d'années (donc avant que je rencontre
les lettres de nos aimables correspondants) et qui parlaient déjà tous
deux de tétravalence alors que je ne connaissais pas ce mot...

Le premier est un koan, bien sûr, mais façon chinoise:

   Le maître Pi se promenait au bord du Yang Tse avec ses élèves.
   Mi Tseu lui demanda" "Maître, quelle est la vitesse du rêve?".
   Maître Pi s'arrêta puis s'assit sur une pierre plate au bord
   de l'eau, le regard perdu au loin sur le fleuve.  Ses élèves
   l'imitèrent et s'assirent eux aussi en silence.  Le silence
   du maître se prolongeant, Mi Tseu demanda encore: "Maître, le
   rêve va-t-il plus vite que la lumière?"  A ces mots, un canard
   s'envola sous les regards du maître et de ses disciples.
   Maître Pi dit alors: "Le canard qui s'envole me pose-t-il ces
   questions?  Il rêve d'un endroit plus chaud pour passer l'hiver
   et il s'envole pour l'atteindre.  Mi Tseu me demande la vitesse
   du rêve et il reste debout à attendre."  A ces mots les élèves
   éclatèrent de rire, Mi Tseu eut honte et s'encourru.  Parvenu
   loin de maître Pi et de son humiliation, il s'arrêta et s'assit
   face au fleuve.  A ce moment, un canard vint se poser devant lui,
   alors Mi Tseu eut un satori (connut l'illumination).

Le second texte utilise aussi le thème de la vitesse du rêve, mais
c'est pour en faire un amusant délire pseudo philosophique qui, sans
doute pas vraiment par accident, touche à la tétravalence:

   Suivant le raisonnement classique de Descartes "je rêve, donc je
   suis", le rêve est une activité subordonnée.  En effet, si je suis,
   je suis forcément quelqu'un.  Et si je suis quelqu'un c'est que
   quelqu'un me précède.  S'il me précède c'est qu'il vient avant moi,
   ce qui signifie qu'il m'est supérieur.  Je suis donc subordonné à
   celui que je suis, relation essentiellement statique contrastant
   avec la dynamique fondamentale de la pensée vivante.
   Pour Pierre Teilhard de Chardin, le rêve est une activité
   créatrice et subsumante: "L'Omega rêve l'Alpha et de ce rêve naît
   le temps, la matière et l'espace, ouvrant ainsi la porte à
   l'évolution qui culminera par l'Omega."  Se projetant ainsi - par
   le rêve - hors du temps, l'Omega devient l'Alpha, cause finale et
   cause initiale englobant d'un seul regard instantané tout le passé,
   tous les presents et tout l'avenir.
   Confucius éclaire d'un jour particulier la confusion essentielle
   entre rêve et réalité "Suis-je une homme qui rêve être un papillon,
   ou suis-je un papillon qui rêve être un homme?".  Rêve et réalité
   sont ainsi ramenés à leur commune essence: la pensée, seule source
   de réalité et de transcendance.
   Depuis l'aube des temps, les grands penseurs proclament ainsi haut
   et fort l'intemporanéïte du rêve: le rêve n'a pas de vitesse, il se
   contente d'être.  Le rêve est donc, essentiellement, essence.
   Essence de l'être pour Descartes, essence du réel pour Teilhard,
   essence du soi pour Confucius, essence aussi de la culture (par
   le biais des archétypes projetés dans le rêve par l'inconscient
   collectif) pour le suisse Carl Jung, le rêve est sans vitesse.
   Le rêve est, tout simplement.

Encore merci pour ton message, ami Manolo!

Doux rêves à toutes et à tous!
                                  Norman.

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